Deux avis autorisés
Première citation :
<< L’école de la République, symbole du modèle républicain, n’existe plus depuis longtemps. Je connais l’école républicaine : j’y ai étudié. C’était une institution avec des exigences sévères, un lieu austère, assez déplaisant, qui avait édifié des murs élevés pour se protéger du bruit de l’extérieur. Trente années de réformes stupides ont changé notre paysage. L’école de la République a été remplacée par une « communauté éducative », plutôt horizontale que verticale. Les programmes scolaires ont été rendus plus faciles, le bruit de l’extérieur est entré, la société est entrée dans l’école.
Le résultat est que ce que nous voyons aujourd’hui est, en fait, l’échec du ‘sympathique’ modèle post-républicain. Le problème, avec ce modèle, c’est qu’il se nourrit de ses propres échecs : chaque fiasco est une raison pour qu’il devienne encore plus extrême. L’école sera encore plus ‘sympathique’. Alors qu’en fait, étant donné ce à quoi nous assistons, une plus grande rigueur et des normes plus exigeantes sont le minimum de ce que nous devons demander. Sinon, nous ne tarderons pas à avoir des ‘cours de délinquance’.
C’est une évolution caractéristique de la démocratie. La démocratie, en tant que processus, ainsi que l’a montré Tocqueville, ne tolère pas l’horizontalité. En démocratie, il est difficile de supporter des espaces non démocratiques. Tout doit être fait de manière démocratique dans une démocratie, mais l’école ne peut pas fonctionner de cette manière. Elle ne le peut tout simplement pas. L’asymétrie saute aux yeux : entre celui qui sait et celui qui ne sait pas, entre celui qui apporte avec lui un monde, et celui qui est nouveau dans ce monde. Le processus démocratique rend illégitime cette asymétrie. C’est un phénomène général dans le monde occidental, mais en France il affecte une forme plus pathétique, parce que l’une des caractéristiques de la France est son éducation stricte. La France a été construite autour de son école. >>
Source : Alain Finkielkraut. interview à »Haaretz »
Deuxième citation :
<< Depuis un an et demi que j’ai commencé à m’intéresser sérieusement à l’état de l’éducation dans notre pays – en lisant tous les livres de témoignage d’instituteurs et de professeurs que j’ai pu trouver, en recueillant systématiquement tous les témoignages oraux ou écrits d’enseignants avec qui je peux être en contact, en interrogeant moi-même des jeunes pour jauger ce qu’ils savent ou ne savent pas – je suis arrivé à la conclusion que notre système éducatif public est en voie de destruction totale.
Cette destruction est le résultat de toutes les politiques et de toutes les réformes menées par tous les gouvernements depuis la fin des années 60. Ces politiques ont été voulues, approuvées, menées et imposées par toutes les instances dirigeantes de l’Éducation Nationale. (…)
Les meilleurs programmes sont ceux de 1923 (et, soit dit entre parenthèses, ils tiennent en cinq pages, toutes matières et tous niveaux confondus). D’ailleurs, ce sont à ma connaissance ceux qui sont toujours en vigueur (moyennant une mise à jour dans certaines matières) au cours Hattemer à Paris: un cours privé « hors contrat », donc sans la moindre subvention de l’Etat, à qui nombre de familles très aisées (et, paraît-il, certains de nos ministres présents ou passés) confient leurs enfants en payant le prix fort. >>
Source : Laurent Lafforgue, médaille Fields de mathématiques
J’avoue que cet alarmisme m’étonne. J’ai moi-même proposé de renouveler les « humanités » et de remettre la morale et La Bible au programme, mais j’ai peine à croire que les choses en soient arrivées à ce point.
Laisser un commentaire