Cinéma et école
Les débats sur le Da Vinci Code, passé du livre au film, fournissent une nouvelle occasion de mettre à jour le « socle de connaissances » que devrait fournir l’Ecole publique.
Voilà ce que j’écrivais dans ma Saga de la laïcité, me référant à la « Lettre aux instituteurs » de Jules Ferry.
« (… Jules Ferry cite) « « cette bonne et antique morale que nous avons reçue de nos pères et que nous nous honorons tous de suivre dans les relations de la vie sans nous mettre en peine d’en discuter les bases philosophiques ». Mais il prend la peine d’envoyer « la liste complète des traités d’instruction morale et civique qui ont été, cette année, adoptés par les instituteurs dans les diverses académies ». Voilà bien le problème. Nous n’avons pas tenu à jour cette liste de traités, nous appelons cela « démission ». Celle des parents, celle de l’école, celle de l’Etat ont laissé le champ libre aux médias.
Les rapports et les commissions sur « le fait religieux » ou sur « la crise de la laïcité » n’ont de sens que s’ils recommandent de rédiger ces traités d’instruction morale et civique pour les instituteurs, pardon, pour les professeurs des écoles. Pour faire comprendre aux enfants de nos écoles, collèges et lycées, la chance qu’ils ont d’habiter un Etat développé et une démocratie, qui, selon le mot de Churchill, est le plus mauvais des systèmes à l’exception de tous les autres, pour leur faire comprendre aussi la responsabilité qu’ils ont s’ils veulent perpétuer cette chance et l’étendre à tous les enfants du monde, il faudra commencer par le commencement, c’est-à-dire par la Bible dans ses diverses versions, avec ses commentaires ou paraphrases, y compris contestataires, talmudiques, évangéliques, coraniques, voltairiens…
Les Dix Commandements devraient faire partie de la culture générale en France, et chacun devrait savoir que les numérotations juive et chrétienne diffèrent. Il faudra mobiliser toutes les ressources apportées par le xxe siècle, en particulier le cinéma et l’informatique. L’abondance et la longueur des citations de cet article n’auraient pas été possibles sans Internet et le moteur de recherches Google. Le cinéma américain a de quoi alimenter tous les enseignements civiques, moraux, politiques et religieux qu’on voudra. Comment mieux commenter « Tu ne tueras pas » que par Le train sifflera trois fois ou Qui a tué Liberty Valance ? Comment mieux comprendre un système judiciaire qu’avec Douze hommes en colère ? De nombreux films évoquent des épisodes bibliques : Les Dix Commandements, Samson et Dalila, David et Bethsabée, Salomon et la Reine de Saba, dont on pourra comparer les scénarios aux textes originaux…
Un serment officiel ? Pourquoi en France ne se fait-il plus sur la Bible, et aux Etats-Unis, si ?
Un mariage ? Qui marie ? Un curé, un pasteur, un maire, un juge, un notaire ? Quelles questions pose-t-il ? :
« Roméo, ici présent, acceptes-tu de prendre Juliette, ici présente, pour épouse ?…
– Juliette, ici présente… ».
Comparons les questions et les réponses avec celles de la Genèse (3, 11 à 13) : « Femme, as-tu mangé de l’arbre ?
– J’ai mangé.
– Et toi Adam ?
– J’ai mangé. »
Et si c’est un rabbin qui officie (en Amérique, le monde juif n’est pas absent des écrans), comment cela se passe-t-il ?
Quant à la presse people et aux séries télévisées, elles sont une source inépuisable de commentaires sur les frontières de la vie privée et de la vie publique, et sur les institutions civiles, juridiques et politiques. Voilà où les professeurs d’aujourd’hui peuvent trouver « ces mille prétextes qu’offrent la classe et la vie de tous les jours pour exercer le sens moral de l’enfant » dont parlait Jules Ferry. (…) »
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