Démagogie et statistique

Démographie et politique Ajouter un commentaire

Enseignants, juges, statisticiens, mêmes coups bas !

Voilà que Nicolas Sarkozy emboite le pas de Ségolène Royal et dénonce l’indice des prix, qui surestimerait le pouvoir d’achat. Quand Ségolène Royal met en cause la durée du travail de certains enseignants, tous les enseignants se sentent visés. Quand Nicolas Sarkozy met en cause la décision d’un juge, tous les juges se sentent visés. Les statisticiens ne sont ni aussi visibles, ni aussi nombreux que les enseignants ou les juges, mais le cas est analogue. Arrêtez, Mesdames et Messieurs les candidats, de faire de la démagogie sur le dos des statisticiens ! Les statistiques françaises ne sont pas parfaites, mais elles éclairent la plupart des problèmes, à condition que ceux-ci soient bien posés.

Sur l’indice des prix, je fais mienne cette notation de Michel Volle : “Si l’on s’inquiète de l’écart qui existe entre l’évolution moyenne et celle que ressentent les plus pauvres, ce n’est pas à l’indice des prix qu’il faut s’attaquer mais à la pauvreté : le vrai problème réside dans l’accroissement de la dispersion des revenus, que la statistique constate clairement mais dont, étrangement, on ne parle guère.

Sur l’écart entre Faits ressentis et mesure statistique, je renvoie à l’article de René Padieu paru sous ce titre dans ”La Croix‘ du 14 novembre 2006.

Sur les statistiques de la délinquance, je renvoie aux travaux de l’Association ”Pénombre”.

Sur les exagérations absurdes du nombre de Musulmans en France, je rappelle les estimations et études de Michèle Tribalat.

Enfin, sur la représentativité des syndicats, je cite cette appréciation trouvée dans Le Monde d’hier soir, sous la signature de Dominique Andolfatto et Dominique Labbé, historiens des syndicats :

Quant à mesurer l’audience des syndicats pour mieux étalonner leur représentativité, il existe déjà de nombreuses consultations professionnelles qui renseignent de façon précise. Pour la fonction publique, un rapport annuel de grande qualité recense de façon exhaustive les résultats des élections aux commissions administratives paritaires. Pour le secteur privé, les résultats des élections aux comités d’entreprise fournissent un étalon suffisant. Compte tenu des difficultés que présente leur compilation, en raison d’un tissu économique changeant, ces résultats sont certes plus discutés mais leur tendance est difficilement contestable. Pour les plus petites entreprises, on pourrait recenser les résultats des élections des délégués du personnel, comme cela a été fait dans le passé. Cela soulèverait des questions de méthode plus complexes, mais moins délicates que celles posées par une élection-test. Enfin, concernant les effectifs syndiqués, on notera que, contrairement à une idée reçue, des informations abondantes circulent. Il est également assez simple de procéder à des vérifications ou à des estimations lorsque les données manquent.

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2 ré:ponse à “Démagogie et statistique”

  1. RP a écrit :

    Faits ressentis et mesure statistique

    [paru dans La Croix le 14 novembre 2006]

    René Padieu

    inspecteur général honoraire de l’INSEE, président de la commission de déontologie de la Société française de statistique

    La statistique donne une vue synthétique d’une population, d’un ensemble d’objets ou d’un ensemble de faits. C’est là son intérêt : permettre d’appréhender ce qui, de par le nombre d’éléments, échappe à la perception individuelle. Mais, cette différence de perspective engendre une différence de perception. Ce que la statistique dit globalement ne coïncide pas avec ce que je perçois localement. De là peut venir le doute, d’autant plus que l’attention est captée par les cas saillants. De ces écarts, les exemples abondent. Durant les « Trente Glorieuses », le pouvoir d’achat a sensiblement triplé, tandis que l’on se mobilisait constamment contre sa « dégradation ». Les intoxications aux lysterias font la une des journaux alors qu’elles sont devenues dix fois moins nombreuses qu’il y a vingt ou trente ans, où l’on n’en parlait guère. Le sentiment d’une insécurité croissante s’alimente à la publicité donnée à des violences dénoncées là où jadis elles semblaient normales.

    L’écart entre les faits rigoureusement observés et dénombrés et le sentiment populaire permet aux statisticiens de conclure que, objectivement, le sentiment a tort. Mais il n’est pas sûr qu’ils aient raison d’avoir raison contre le sentiment : car, quel est l’objet que la demande sociale leur désigne à mesurer ? Par leur retard à prendre en compte l’objet socialement désigné, ils manquent à leur mission. Et pourtant, on ne peut référer le sentiment populaire à lui-même : chercher des repères qui ne dérivent pas avec lui est aussi nécessaire que légitime. Le choix de l’objet statistique est donc délicat, paradoxal même. En effet, il repose sur les représentations que la population se fait ; or, elles évoluent. Cela se complique même encore lorsque ces représentations se modèlent en fonction de l’information reçue, c’est à dire en partie à partir de ce que la statistique rapporte de la situation sociale. En partie seulement, car cette construction des représentations ou opinions repose aussi sur les discours, les propagandes, sur tout ce que notamment les médias véhiculent. C’est du reste pourquoi les politiques cherchent souvent à s’assurer de ce que les médias et les statisticiens diront : ceux-ci ont pour commune déontologie de ne pas se laisser instrumentaliser.

    Mais, même si l’on veille à ne pas être pris comme instrument de propagande, on se laisse facilement abuser par l’écart entre ce que la statistique paraît mesurer et ce que reflètent réellement les résultats. On opposerait ainsi une signification « nominale » et une signification réelle, comme on parle de la valeur nominale d’une monnaie par différence avec ce qu’elle achète en fait. Dans les enquêtes où l’on demande une opinion, on glisse souvent de celle-ci à ce qu’elle allègue. On y demande « avez-vous été victime d’un vol ou d’une violence ? » : souvent, le commentateur rapporte « x % des personnes ont été victimes », alors qu’on devrait dire « x % estiment avoir été victimes » : en effet, des faits de moyenne gravité ont pu, selon les gens et selon l’époque, être ou non ressentis comme des atteintes. Un chercheur interviewé récemment par un hebdomadaire citait une enquête où 60 % des gens estimaient les élus corrompus et l’interview semblait commenter cela comme la mesure d’un niveau effectif de corruption. De même, dans une enquête sur les intentions de vote, on ne peut affirmer que ceux qui déclarent qu’ils voteront pour un candidat voteront effectivement pour lui.

    Ainsi, d’un côté, on invalide ce que la statistique dit, parce que cela ne correspond pas au sentiment qu’on a ou à la certitude qu’on voudrait avoir. De l’autre côté, on est tenté de prendre pour argent comptant des résultats qui constatent un sentiment, mais ne mesurent pas exactement ce sur quoi ce sentiment porte. C’est donc un dialogue subtil et loyal que les professionnels, mais aussi leurs relais médiatiques, et tout autant le public doivent entretenir entre subjectivité et désir d’objectivation.

  2. Archer a écrit :

    Bonjour,

    J’ai parcouru quelque peu votre site et plus particulièrement l’une de vos références : L’association pénombre.

    J’ose croire que c’est une plaisanterie de votre part. Avez-vous déjà consulté REELEMENT ce site ? Allez donc sur ce lien : www2.unil.ch/penombre/41/…

    De telles approximations et extrapolations sont du plus mauvais goût, eu égard aux forces de l’ordre, pompiers et autres services sociaux qui accusent quotidiennement les coups.

    Prenons un simple exemple de leur… « hypothèse » (j’en rigole encore) :

    Hypothèse 2 - Combien ont participé aux violences : 1 sur 10, peut-être ? Ça fait 20 000 à 25 000, ce qui est cohérent avec le nombre de voitures brûlées (sachant qu’ils ont pu se mettre à plusieurs pour brûler une voiture, mais que le même groupe a pu en brûler plusieurs).

    Cela vous paraît-il cohérent ? En vertu de quoi seulement 1 jeune sur 10 provenant de l’immigration dans les quartiers difficiles aurait participé ? Lorsqu’on sait que ces jeunes sont regroupés en bandes, une telle affirmation est des plus stupides. Toutes les autres spéculations sont du même acabit. Autant ne rien écrire et surtout ne rien prétendre lorsqu’on est aussi incompétent. Même si le ton est humoristique (certains trouvent ces actes amusants – incroyable !), je ne vois pas l’utilité d’afficher des chiffres creux sur un site qui se prétend sérieux.

    On continue dans la divagation avec cette page-ci : www2.unil.ch/penombre/41/…
    Où l’auteur, fort de son intelligence « suppérieure » nous gratifie d’énormités :

    Lors d’un voyage à Istanbul, il y a quelques années, le guide turc nous expliquait que son pays (que tout le monde qualifie de « laïc ») comptait 97 % de musulmans, autrement dit, que tous les Turcs, à l’exception des quelques minoritaires d’origine grecque ou arménienne, appartenaient à l’islam. On ne peut s’empêcher de penser qu’un certain nombre de ces « musulmans » sont assez tièdes, voire que certains sont carrément athées.

    Voici ce que disent les actualités :

    "Meurtre abominable contre des chrétiens en Turquie
    vendredi 20 avril 2007
    A nouveau en Turquie on a fait couler le sang de l’innocence, en égorgeant trois protestants, le pays s’enracine dans une criminalité contre les minorités religieuses.

    C’est dans un esprit inhumain que des criminels ont ligotés et bâillonnés, deux hommes, leur ont tranché la gorge, leur donnant la mort à cause de leur foi, du fait qu’ils étaient chrétiens, qu’ils diffusaient la Sainte Bible. C’est dans cet état qu’ils ont été retrouvés mercredi par la police dans les locaux de la maison d’édition chrétienne Zirve, à Malatya dans l’est de la Turquie. La troisième victime, massacré de la même manière est morte de ses blessures à l’hôpital. Tous trois ont été atrocement torturés. Les victimes deux Turcs et un Allemand ont ravivé, dans un pays officiellement à 99 % musulman, l’angoisse suscitée par de précédents meurtres visant les minorités religieuses."

    http://www.radinrue.com/spip.php...

    J’ai donc « apprécié » la phrase « On ne peut s’empêcher de penser qu’un certain nombre de ces « musulmans » sont assez tièdes, voire que certains sont carrément athées.
    D’autres pages sont du même genre.

    Enfin, un droit de réponse outré a été envoyé par l’IHESI à cette adresse : www2.unil.ch/penombre/24/…
    Dès lors, si vous estimez votre site comme objectif et utile, il serait approprié de vous éloigner de telles « références

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